Niveau de vie

J'observe un grand débat autour de la suppression de la taxe d'habitation pour certains, et de l'augmentation de la même pour d'autres. Comme d'habitude, je ne fais pas partie des contribuables exonérés… j'entends bien l'effort de solidarité, le fait que "ah oui mais tu gagnes plus d'argent que moi, c'est normal que tu payes plus" etc.
Je n'ai jamais rechigné à payer mes impôts (enfin, si… mais ça c'est parce que je suis grippe-sou), je suis très heureuse d'avoir un accès aux soins plus facile qu'ailleurs, une école publique, des policiers qui ne sont pas des miliciens, un nettoyage de ma rue ou encore le ramassage de mes poubelles, entre autres choses.
En revanche, qu'on me dise que j'ai de la chance, j'ai un peu beaucoup plus de mal à l'accepter.
Certes, j'ai une maison, un cheval, un chien, une jolie voiture (2 si on regarde la situation du foyer) et je pars en vacances. J'aimerai en revanche qu'on me dise où se situe ma chance…
Ma chance, c'est d'avoir bossé pour réussir mon cursus scolaire. Ma chance, c'est d'avoir choisi une filière courte et d'avoir commencer à bosser en usine.
Ma chance, c'est d'être allée me confronter à des jurys de concours pas toujours bienveillants, pour entrer dans la fonction publique et y progresser. Ma chance, c'est de me lever tous les jours à 5H30. Ma chance, c'est de démarrer ma journée de travail sans jamais savoir quand elle s'arrêtera. Ma chance, c'est de bosser comme une damnée sans vraie reconnaissance de qui que ce soit. Ma chance, c'est d'appartenir à un secteur professionnel régulièrement trainé dans la boue dans les médias. Ma chance, c'est d'avoir accepté de faire 4 heures de trajet quotidiens pendant 2 ans pour évoluer professionnellement. Ma chance, c'est d'avoir dû imposer à mon fils ainé des journées de 7H00 à 19H00 dès sa première année d'école. Ma chance, c'est d'avoir un téléphone dont je ne peux jamais me séparer au cas où une urgence pro viendrait pointer le bout de son nez. Ma chance, c'est de devoir toujours me remettre en question et à niveau. Ma chance, c'est d'encadrer plusieurs personnes, dont certaines ne sont pas des cadeaux. Ma chance, c'est de vivre à des centaines de kilomètres de ma famille et de ma belle-famille, sans aucun soutien à proximité en cas de coups durs (merci mes voisines chéries de nous avoir sortis de la mouise plus d'une fois).
Alors oui, le cheval, la maison, la voiture, les vacances… tout le monde n'en a pas autant. Mais ça ne tombe pas tout seul. Et si on veut bien se donner la peine de regarder de plus près :
J'ai un cheval mais une garde-robe plus que faible et pas renouvelée.
J'ai une maison, pour laquelle nous nous sommes endettés sur 20 ans.
J'ai une voiture, qui a 9 ans.
J'ai des vacances : au ski dans le Jura quand bon nombre de "moins chanceux" que moi vont dans les stations huppées, pour un prix 4 à 5 fois supérieurs à ce que nous payons ; à Pâques pour une découverte d'une région, quand les locations sont 3 fois moins chères qu'en été.
Soyons clairs ; je ne me plains pas de ma vie. Ce n'est pas tous les jours facile, je rêve de gagner la plus grosse cagnotte de tous les temps au loto, de vivre d'amour et d'eau fraiche, mais j'apprécie et je mesure ce que j'ai. Par contre, je n'admets pas qu'on me dise que j'ai de la chance. Notre situation, ça fait 25 ans qu'on se la construit. 25 ans de choix, de décisions, de sacrifices, d'efforts.
Donc avant d'envier et de jalouser… ce serait bien aussi de regarder plus loin que le bout de son nez, et avec un autre horizon que son nombril.

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