Le gros méchant virus qui fait peur

Ah ben oui, à force, fallait bien que moi aussi, j'en parle, du covid-19 !
Je ne suis pas une spécialiste, mais ce que je sais, c'est qu'on assiste à du grand (très très grand) n'importe quoi.



Bon, au début, c'était pas super grave hein, ça concernait la Chine, et c'est loin, la Chine... Et puis en plus, nous, on ne mange pas de pangolin ni de chauve-souris, donc on s'en fout un peu.
Sauf que zut de zut, le virus a eu la mauvaise idée de ne pas respecter les frontières. Et bam, on le retrouve un peu partout. La porte d'entrée européenne a essentiellement été l'Italie. Déjà, là, ça faisait un peu moins rigoler. L'Italie, c'est pas si loin... et puis il y a plein d'italiens en France, et plein de français qui vont voir le carnaval de Venise pendant les congés d'hiver (moi, j'ai préféré manger du comté jurassien plutôt que du parmesan, j'ai été bien inspirée). Et je ne parle pas de ceux qui optent pour les stations italiennes pour aller skier (clin d'oeil à celle qui se reconnaitra... je t'aime 💖)

Là, déjà, on a commencé à sentir un peu de puanteur : "c'est la faute aux chinois", "c'est la faute aux italiens", "je ne mange plus de nems ni de pizzas..." "oh mais dis donc, toi, t'aurais pas les yeux bridés ? pis t'es marié à une italienne ? aaaahhhh, dégage, je ne veux pas que tu t'approches !" "De toutes façons, les étrangers, ils sont pas français, donc de base, ça les rend suspects".

Voilà qui  aurait déjà dû nous alerter. Ce petit virus révèle la profondeur d'esprit et la capacité de réflexion de l'être humain...

Et puis zou, ça y était, en moins de temps qu'il n'en faut pour se moucher, la France était touchée à son tour. Arrivée par la Picardie (perso, à choisir, je préfèrerais choper le truc au cours d'un voyage à Venise plutôt que pendant un week-end romantique à Creil, mais ça n'engage que moi).

Alors là, on a assisté (et on assiste encore !) à des scènes surréalistes.
Déjà, je vous informe que la délation reste un sport fort apprécié des français ! c'est marrant, je me souviens que quand on étudiait à l'école les vagues de dénonciations autour de la 2nde guerre mondiale, nous étions tous horrifiés que l'on puisse faire ça... visiblement, il y en a qui ont été horrifiés moins longtemps que d'autres... nous avons donc du "je vous écris pour vous signaler que ma voisine était à Milan mais qu'elle veut pas le dire", avec un peu de "mon voisin tousse mais je suis sûr qu'il ne veut pas consulter", etc etc.
Mouai, c'est pas joli-joli, on est d'accord.

On voit aussi l'inverse. Celui qui était dans une zone bien bien contaminée, mais qui n'a rien dit ou qui a menti pour ne pas perturber sa petite vie.  Ou celui qui ne respecte pas sa quarantaine parce que "fuck le reste du monde". Ouai mon gars, t'es un champion toi... Responsabilité individuelle, protection collective, ça te parle ? Notons à ce propos qu'en Allemagne, dans au moins un Lander, le non-respect d'une quarantaine est passible de 2 ans de prison. Je dis ça, je dis rien.

On a aussi du commentaire de comptoir puissance 10 000 : et vas-y que je sais mieux que tout le monde ce qu'il faut faire (et que bien sûr on ne fait pas), et vas-y que je critique les écoles ouvertes, et vas-y que je critique les écoles fermées, et pourquoi les matchs de foot publics sont autorisés, et quelle horreur ! le PSG va jouer à huis-clos, quel scandale !!!
Je passe sous silence le "de toutes façons, c'est pour empêcher les manifestations " (bon, OK, je reconnais que le 49.3 en pleine crise sanitaire, c'était quand même un peu osé...).
Et que dire du : de toutes façons, c'est un virus créé par les labos chinois pour déstabiliser l'Occident (variante : c'est le FBI qui est derrière ça, mais ils ont foiré et ça s'est échappé dans la nature).
Ouhouh, les complotistes, je vous rappelle que c'est déjà ce qui était dit du SIDA à une époque... faudrait changer de répertoire un peu !

Nous avons aussi le consommateur averti qui stocke 6 mois de pâtes dans son sous-sol. Bah oui, pendant les grandes épidémies de peste, le pauvre peuple souffrait de famine, faut pas oublier ! Oui oui oui... on ne mangeait pas de pâtes, non plus, pendant les grandes épidémies, c'est sûrement un tort d'ailleurs.
C'est sans doute le même qui file remplir tout ce qu'il peut d'essence dès qu'un syndicaliste de raffinerie éternue.

Nous avons les durs-à-cuire : bah, de toutes façons, ce truc-là, c'est rien du tout, ça va, et y'a plein de choses qui tuent beaucoup plus de monde que ça !
C'est vrai. Pour autant, faut-il le prendre à la légère ? Ignorer le risque sanitaire ? je n'en suis pas exactement certaine.

Nous avons les médecins généralistes qui se sentent soudainement l'âme d'infectiologues chevronnés, et qui bien sûr, savent absolument tout ! y compris sur la nécessité d'empêcher des élèves d'aller dans une piscine dans laquelle ont pataugé des nageurs revenant d'une compétition en Italie (bien avant que ça devienne un bordel sans nom chez nos voisins). Le fait que ledit médecin soit un maire en plein campagne pour sa réélection n'est sans nul doute qu'un hasard...
Ou le médecin convaincu qu'on va tous mourir, et qui le dit à ses patients... Remarquez, techniquement, il n'a pas tort. Mais on peut peut-être lui dire que certes, on va tous mourir, mais pour bon nombre d'entre nous, pas avant plusieurs décennies.

Nous avons tous ceux qui s'étonnent de voir plein de gens malades. Vous savez que nous sommes en pleine épidémie de grippe, rhino et autres gros rhumes ? et attention, scoop, c'est comme ça tous les ans ! (en plus, à mon avis, le non-hiver que nous avons connu a sans doute aidé à la prolifération de toutes ces petites saletés qui nous font tousser. On parlera réchauffement climatique une autre fois).

Nous avons aussi tous ceux qui découvrent avec stupeur qu'il faut...se laver les mains !!! et qu'en plus, on peut le faire avec du savon. Si si si, je vous assure ! et on évite de tousser les uns sur les autres, et on évite aussi de se serrer la main (punaise, ça, ça m'arrange en ce moment !!!).
Euh, les gens, vous savez, ce sont des gestes normaux, qu'il faut appliquer avec un peu plus de rigueur en période d'épidémies saisonnières (vous savez, la grippe, la gastro, tout ça...), ou dès qu'on est malades.

Que dire de tous ceux qui sont sûrs d'avoir été contaminés : mais si voyons, ils ont croisé le frère du cousin de la belle-soeur du boucher de la maitresse du voisin, et il a été diagnostiqué positif. Si ça, c'est pas un fait scientifique établi, je ne sais pas ce qu'il vous faut !
Le pire, je crois, ce sont ces gens qui affirment être testés positifs, ou que leur enfant l'est, alors qu'en fait, ça n'est pas vrai. Non mais sérieux, où est l'intérêt ? se faire plaindre ? faut pas avoir de vie pour en arriver là... ou alors, c'est pour avoir les 14 jours de confinement... ouai, parce que quand même, c'est chouette d'être à la maison, payé à rien faire...
J'hésite mais bon, faut leur dire la vérité : confinement, ça peut vouloir dire, pour beaucoup, télétravail (même si c'est sympa, ce ne sont pas des vacances). Et je ne suis pas certaine qu'il soit super fun d'être coincé chez soi, à prendre sa température 2 fois par jour en attendant l'hypothétique survenue d'une maladie dont on ne sait finalement pas grand'chose. Dans le genre flippant, ça doit être pas mal.

J'aime aussi beaucoup les journalistes qui se ruent sur le dernier cluster recensé, et prennent des voix dramatiques pour dire qu'ils sont sur place et... qu'il n'y a rien à voir. Non parce que figurez-vous que ce virus ne se voit pas. C'est dingue, non ?
En plus, il n'est pas dans l'air (rappelons-le, ça ne mange pas de pain), donc le reporter spécial de BFM ou M6 à Lagny-le-Sec ou Crépy-en-Valois ne risque pas sa vie. Sans déconner, ils ont des tons plus dramatiques encore qu'au soir du Bataclan, ou que les correspondants de guerre qui viennent de voir leur collègue sauter sur une mine...

Les décomptes officiels ont aussi leur part dans mon agacement... à quel moment on parle des cas actifs, c'est à dire en déduisant les guérisons du nombre de personnes contaminées ? On a l'impression d'un décompte morbide, et qu'en plus si ça n'est pas la catastrophe attendue, tout le monde sera déçu.

Et puis -mais ça c'est mon côté tatillon- ça m'agace qu'on dise LE coronavirus. C'est UN coronavirus, parce qu'il en existe tout plein, comme celui qui donne le rhume (celui-là, je ne le remercie pas, c'est lui qui nous fait l'oeil larmoyant et le nez rouge tomate, avec reniflette intégrée).

Je mentirai si je disais que je ne suis pas un peu inquiète. Avec ma grippe surinfectée, je coche toutes les cases "symptômes covid-19". Sauf qu'il n'y a plus - du moins dans mon département- de dépistage systématique, et comme je ne suis pas une personne à risque, il est probable que si je l'attrapais, ça n'aurait pas de graves conséquences pour moi. Donc, je ne suis pas testée.
Ah oui, à ce propos, par personne à risque, il faut comprendre à santé fragile ou ayant des risques avérés du fait de certaines pathologies et suite d'opération. Ce n'est pas "à risque de choper le corona"(et moi, je préfère la despé. Désolée, fallait que je la place).

Bref, j'avoue que je serai plus rassurée si je pouvais être dépistée.

C'est irrationnel, je le sais, parce qu'en plus il ne se passerait rien de plus qu'actuellement : on reste au chaud, et pis c'est tout (enfin si, quelques antibios du fait de l'encombrement de ma sphère ORL, #glamour)
Le dépistage systématique n'avait pour but que de limiter la vitesse de propagation et qu'il n'est plus utile dès lors que le petit covid-19 se balade un peu partout, tout seul comme un grand... ça c'est mon côté rationnel.

Quoi qu'il en soit, au-delà de l'inquiétude liée à l'apparition d'une nouvelle maladie, je suis atterrée de constater que ce qui est mort et bien mort, c'est le bon sens. Les fakes news ont de beaux jours devant elles...
Cette épidémie révèle -une fois encore- certains des aspects les moins flatteurs de notre espèce : racisme, auto-centrisme, non réflexion, irresponsabilité, méchanceté, stupidité, complotisme...
Pourtant, je persiste à croire que si on ne voit que ces choses-là, c'est parce que les autres se taisent... non pas parce qu'ils n'ont rien à dire, mais simplement parce qu'ils vivent leur vie en s'adaptant aux circonstances, sans hurler à la fin du monde ni virer survivaliste dès qu'un souci se présente. A tous ceux là : tenez-bon, je suis avec vous, nous ne sommes pas seuls !!!




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